Comment aménager à proximité des axes routiers ? Comment limiter l’exposition des habitants à la pollution de l’air ? En Seine-Saint-Denis, au nord de Paris, l’établissement public territorial de Plaine Commune a profité d’opérations d’aménagement pour expérimenter des méthodes qui répondent à ces deux questions. Et qui désormais vont être systématisées. Explications.
Partager
« Nous souhaitions fixer des règles particulières pour définir la constructibilité à proximité d’axes routiers majeurs dans notre PLU-i, adopté en 2020. Faute d’éléments objectifs pour quantifier la pollution de l’air et mesurer ses effets, nous nous sommes contentés de formuler des recommandations… De cette difficulté est née notre volonté de lancer des études de mesure de la qualité de l’air et de modéliser la pollution sur certains secteurs », se souvient Philippe Monges, premier vice-président en charge de la Transition écologique, du climat et de la santé environnementale de Plaine Commune.
Qualité de l’air extérieur
Baptisée Modelairurba et lauréate de l’appel à projets AACT-AIR de l’ADEME une étude pilote a été conduite, de juin 2020 à avril 2022 sur deux sites distincts : le carrefour des Six-Routes, à La Courneuve, où une opération d’aménagement était prévue en lisière de l’autoroute A1, et le secteur de porte de la Chapelle, dans une future zone d’activité encadrée par l’autoroute et le périphérique. « Dans le premier cas, il s’agissait d’évaluer le projet d’aménagement pour pouvoir éventuellement l’amender, dans le second l’évaluation sert à imaginer l’aménagement futur », précise l’élu. Sur les deux sites, la pollution de l’air a été mesurée, les impacts des polluants sur le bâti modélisés, et des recommandations urbaines et architecturales ont été proposées afin de limiter l’exposition des populations à la pollution atmosphérique par un urbanisme adapté. « Les simulations nous ont montré que la circulation des polluants n’a rien d’intuitif et qu’un plan-masse ne permet pas d’en anticiper les impacts sanitaires. Ainsi à La Courneuve, l’aménageur Plaine Commune Développement et la Ville ont décidé de modifier la configuration, de renoncer à 1000 m2 de surfaces de plancher et de repositionner une crèche et une école », indique Philippe Monges. À la suite de cette étude, Plaine Commune souhaite systématiser la démarche et procéder à des campagnes de mesures et de modélisation sur les zones d’aménagement concerté et de rénovation urbaine du territoire situées à proximité des axes routiers majeurs.
Qualité de l’air intérieur
La prise en compte de la santé dans les politiques d’urbanisme et d’aménagement de Plaine Commune s’illustre aussi à L’Île-Saint-Denis, où se construisent une résidence d’étudiants et un immeuble de bureaux qui accueilleront les athlètes des Jeux olympiques et paralympiques de 2024. Là aussi, la proximité de l’autoroute A86 a été prise en compte. Également lauréate de l’appel à projets AACT’AIR, l’expérimentation Prescriairbat vise à faire de la qualité de l’air intérieur un prérequis de l’aménagement, pour tous les acteurs (aménageur, promoteur, maîtrise d’œuvre, etc.) et à toutes les étapes de l’opération : conception, réalisation, livraison. Il intègre la méthode ECRAINS (Engagement à Construire Responsable pour un Air Intérieur Sain) développée par l’ADEME qui s’étend de la construction jusqu’à la première année d’usage du bâtiment. « Ces deux types d’opérations sont complémentaires. La qualité de l’air intérieur dépend en partie de celle de l’air extérieur. L’orientation et l’emplacement des bâtiments importent autant que le choix des matériaux, l’architecture, la végétalisation ou la ventilation pendant les chantiers ou l’usage. Une vision globale de l’urbanisme et de l’aménagement est nécessaire pour mieux prendre en compte les enjeux de santé », conclut Philippe Monges.